Extrait:
Charly
Je me lève, et je me bouscule, et je ne me réveille pas comme d’habituuuuuuuuude !
Sur moi, je remonte le drap, j’ai peur d’avoir froid, comme d’habituuuuuuude !
Je dois quitter la maison par ce grand froid et j’ai peur de cailleeeeeeeerrrrr.
Alors, je traîne encore un peu au lit comme d’habituuuuuuuuude !
Dans le fond, quel jour sommes-nous ? Ah mince, mon réveil n’a pas sonné.
D’où ma visite…
Je suis donc plutôt à la bourre. De toute façon, je connais la chanson par cœur, ce n’est pas comme si c’était la première fois. Toute premièèèèère fois, toute touuuute premièèèère fois ! Les règles sont toujours les mêmes, et puis, j’ai un éditeur qui s’occupe de tout. Donc, zen, mon vieux. Je peux arriver les mains dans les poches. Avant toute chose, émerger de ce cocon tout chaud et plonger sous la douche ! De toutes les matièèèèères, c’est la ouuuuuuate que j’préfèèèèèèère. D’ailleurs, je suis souuuumis en négligé de soie ! Yep !
Mouais, Charly a l’air particulièrement en forme, ce matin. J’ai mal aux tympans. Sa voix résonne dans tout l’appartement dont l’acoustique laisse à désirer. Il se traîne encore entortillé dans son duvet lorsque son smartphone sonne : Max essaye de le joindre depuis un petit temps. Vous ferez la connaissance de ce sympathique garçon dans les pages qui suivent. Mais, pour l’instant, Charly se réveille. Il a pour habituuuuuude de ne pas répondre à ses messages avant d’être passé sous un jet froid à la limite du supportable et d’avoir avalé deux cafés serrés. Nous allons donc suivre notre bonhomme à son rythme, de crainte de perturber son sacro-saint rituel. Sachez que, quand Charly est de mauvaise humeur, mieux vaut ne pas trop s’en approcher. Si nous souhaitons passer une bonne journée en sa compagnie, mieux vaut ne pas le bousculer. Ah, j’oubliais de me présenter : je suis la voix off de cette histoire, le témoin privilégié, l’ange S. de tout ce petit monde. Mais peu importe, donnez-moi le nom qu’il vous plaira, je ne suis pas regardant.
Aujourd’hui, tenue de scène. Heureusement, tout sort du pressing ! J’ai dû apporter trois costumes au nettoyage en même temps. Deviendrais-je négligent ? Non, je ne pense pas, mais tous ces salons se suivent bien trop vite, et je n’aime pas particulièrement « m’habiller ». Si ça ne tenait qu’à moi, j’irais à la rencontre de mes lecteurs en jeans et chemise noire, ma tenue fétiche. Seulement, mon boss, souhaite que nous soyons tous en costume et jupe droite pour les filles. J’ai parfois l’impression de jouer les Stewart. « Les éditions Tomo sont heureuses de vous accueillir à leur stand où vous pourrez rencontrer quelques-uns de leurs auteurs en dédicace. Notre éventail de nouveautés est de sortie. Vous trouverez les informations dans les flyers, marque-pages et autres documents disposés en évidence sur les tables. Les écrivains sont à votre disposition pour un moment d’échange ou pour toutes informations souhaitées. Les éditions Tomo vous souhaitent une excellente visite ». Et n’oublions pas le sourire de circonstance. Quoi qu’il en soit, ce matin, j’ai tout de même décidé de faire une petite entorse au règlement : pantalon noir, chemise noire et veste grenat. Du plus bel effet. Ces dames n’ont qu’à bien se tenir
Pour le moment, Charly se la pète un peu. Il en rajoute une bonne couche, mais c’est sa manière à lui d’entrer progressivement dans la peau du personnage. Celui qu’il ne joue pas si souvent, malgré ce qu’il raconte. S’il a effectivement récupéré ses costumes propres et repassés la veille, c’est grâce à sa mère qui continue à être aux petits soins avec lui, connaissant sa fâcheuse manie de s’y prendre à la dernière minute et d’oublier ce genre de détail. Par contre, il est exact que son éditeur exige de ses auteurs une tenue impeccable. De plus, il a un faible pour les jambes des filles, mais tout ceci reste bon enfant. Voici donc notre homme dans les starting-blocks.
O.K., Max, arrête de ma casser les oreilles ! Que disent tous ces mails ?
Je vous décris la scène : le teint de Charly vire au rose, rouge, violet, pour soudain, devenir blafard. Ses traits se décomposent, il glisse une main dans ses cheveux qu’il ébouriffe (après avoir passé autant de temps à les dompter, c’est plutôt navrant), se laisse tomber sur le matelas et fixe le plafond un certain temps. Je ne m’inquiète pas. Il vient juste de se rendre compte qu’il a commis une groooooosse boulette. Nous allons donc avoir droit à un florilège de jurons bien sentis. Je le mets en sourdine quelques minutes afin de ne pas vous choquer. Je n’aimerais pas que son attitude vous le rende désagréable. Charly est un gars attachant. Nous n’allons pas fausser la donne d’emblée. Laissons-le reprendre pied.
Oh, merde, mais qu’est-ce que j’ai foutu ? Je ne suis décidément qu’un gros imbécile. Comment ai-je pu oublier une chose pareille ? Je suis con, mais con ! À ce point-là, ce n’est plus de la connerie, c’est du suicide littéraire !
Vous ne comprenez pas ? C’est normal. Barnabé, son éditeur, avait simplement chargé Charly de s’occuper de l’installation du stand. Tout devait être monté la veille et prêt pour accueillir ses confrères et les visiteurs. Quand Max est arrivé sur les lieux, il a trouvé un espace vide, d’où ses appels pressants. Nous assistons dès lors à un moment d’apitoiement. Ce passage ne dure jamais longtemps chez Charly. Il a besoin de se dévaloriser pour passer à l’action. Là, je vous assure, il est parfaitement éveillé !
D’abord, rappeler Max. Le rassurer. Barnabé avait tout stocké et étiqueté. Les locaux sont à deux pas du Salon. Je file chez le voisin lui emprunter sa camionnette. J’appelle le responsable de la manifestation et lui demande de nous placer les tables. Max est sur place, mais il panique. Heureusement, nous sommes dimanche et les rues sont désertes. Tout va bien se passer. Je gère !
Impressionnant, notre Charly, non ? Je reviendrai tout de même le voir tout à l’heure… J’ai, comme qui dirait, un pressentiment…
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